Un temps de suspension. Un temps pour contempler, observer silencieusement ces changements qui se sont opérés dans ma vie. Un temps qui m'a éloignée plusieurs mois de l'écriture, car prise dans des sensations nouvelles. Celle de ma vie qui change et qui me prive temporairement de mots. Une expérience purement physique, sensorielle, celle de la maternité renaissante qui m'a transportée ces 4 premiers mois dans un univers complètement inconnu, même avec ma première grossesse. J'ai éprouvé les limites de mon petit cocon douillet et tranquille. J'ai fait comme j'ai pu face aux sensations d'étrangeté à moi-même et aux autres. J'ai fait confiance. En moi, en la vie. J'ai tendu les bras et à d'autres moments je m'en suis entourée.
Et puis, tout doucement, c'est revenu. Comme un corps endolori qui se réveille et qui retrouve sa dimension, sa consistance, qui s'ouvre à nouveau au monde.
Durant cette période, la pratique du yoga ne m'a jamais vraiment quittée. J'en ai fait une expérience complètement différente, beaucoup plus douce. C'était un yoga de l'intérieur qui m'a portée à chaque instant. Moins axé sur les postures, beaucoup plus dans l'immobilité méditative d'un Savasana. Comme une petite lumière toute fragile mais qui est là, tout le temps, au fond de moi. Un fil ténu sur lequel je peux avancer.
Juste avant de partir de la montagne, j'ai versé une larme. Je sens qu'il y en a bien plus qui auraient pu suivre derrière mais ça a bloqué. Alors c'est une larme. C'est mon rythme. Je regardais le ciel scintillant dans le lac, les sommets des arbres, les bras de la montagne, l'écrin de verdure, j'entendais le torrent et je pensais : merci, merci, tout ça.. Pour moi ? Je me sentais presque mal à l'aise par tant de bonnes choses. Je me sentais gênée. Et une autre voix a répondu : aucun arbre autour de toi ne se sent mal à l'aise parce que le soleil et le ciel brillent sur lui. Ils ne se font pas petits en se demandant: vraiment ? Tout ce bonheur... Pour moi ?
Oui, pour toi. Tu mérites tout l'amour du monde. Pourquoi tu penserais le contraire ? Quand est-ce que tu as commencé à penser le contraire ? Laisse le mur que tu as construit autour de ton coeur céder. Laisse la montagne t'enserrer dans ses bras et t'envelopper. Ne retiens rien. Ne t'agrippe pas. Lâche tout et vis, parle et agis avec ton coeur.
Chaque partie de toi mérite d'être aimée.
